The Jumpman, Jacobus "Co" Rentmeester, 1984
La photo d’aujourd’hui s’articule autour du
basketball, les entreprises et le droit. Il s’agit de la photo qui se cache
derrière le logo de la fameuse marque de Nike: Air Jordan. En effet, comme son
nom l’indique, c’est une photo du joueur de basket Michael Jordan.
Par contre, on pourrait dire qu’on n’a pas
utilisé la version officielle, car celle qui est utilisée actuellement par le géant des chaussures n’est qu’une
copie de la photographie prise en 1984 par Jacobus Rentmeester. Photographe
pour la revue Life, il capture le “grand jeté” en l’air de Jordan pour
l’édition spéciale des Jeux Olympiques d’été de cette année. À l’Université de
North Carolina on lui donne 20min, 20min pour capturer la passion de celui qui
venait d’être College Basketball Player of the Year par la NCAA.
Certes, il a réussi mais cette photo est
tout sauf naturelle. Au départ elle était prévue pour être prise dans le
gymnase, mais Rentmeester trouvait qu’il y avait trop de distractions visuelles
d’où le fait qu’elle fini par être prise à l’extérieur. On a dû tondre la
pelouse pour faire ressortir la figure de Jordan qui sprintait dans l’air, et
puis on a rajouté un panier de basket positionné dans un angle précis de façon
à ce qu’il n’y ait pas d’ombre sur le joueur. Après 30min d’essais, il a
réussit le saut parfait: jambes écartés, le ballon à la main gauche il se
prépare pour smasher. Une belle mise en scène, mais fortement critiquée car
elle ne correspond absolument pas à la technique de Jordan, qui d’ailleurs est
d’habitude droitier.
Suite à la publication de l’édition
spéciale de Life magazine, Nike s’intéresse à cette photo. En août de cette
même année, il paye 150$ pour l’utilisation temporelle de celle-ci. Quelques
mois plus tard, il payera 500$. Toutefois, pour éviter de payer cette some
exorbitante à chaque fois, en février 1985 Nike décide de faire sa propre
photo. Problème: elle reprend les mêmes éléments que celle de Rentmeester, à ce
que Nike répond “qu’il n’y pas 1000 façons de mettre le ballon dans le panier”.
Alors il décide de s’embarquer dans un litige qui reprendra 20 ans plus tard.
On ajoute quelques zéros dans le chèque et il parvient à se faire payer 15 mil
dollars pour l’utilisation de sa photo pendant 2 ans sous prétexte d’infraction
aux droits d’auteur ou “copyright”.

Étant un géant de l’industrie, Nike décide
de continuer à utiliser la silhouette de Jordan comme logo après la fin des
deux années autorisées: c’est la naissance du logo "Jumpman" qui devient
l’ambassadeur officiel de la marque Jordan créée en 1997. Il a été introduit pour
la première fois dans les chaussures Air Jordan III en remplaçant les ailes qui
se trouvaient dans le modèle précédent. En 2014 sa valeur s’élève à 3,2
milliards de dollars et se classe parmi les premières dans le domaine des
chaussures et équipements sportifs. Néanmoins cette industrie ne se limite pas
à la hauteur des pieds. Dans les années 1990’s, Nike fait une série de
campagnes avec Jordan et le lapin préféré de Warner Brother’s: Bugs Bunny, où celui-ci
posait au style du Jumpman. Les enfants furent aussi fascinés que Nike
lorsqu’il a vu son chiffre d’affaires doubler grâce à la participation du lapin
dans sa campagne. Mais il faut aussi valoriser la sortie du film Space Jam qui
combine animation et les talents artistiques de Michael Jordan, l’histoire met
en scène l’apogée de sa carrière avec son smash depuis la moitié du terrain avec
le groupe des Looney Tunes.
Pendant tout ce temps là on peut se
demander qu’est-ce qui lui est arrivé au pauvre Renmeester. Pour lui, le cheque
de 1987 n’est pas suffisant quand on le compare au succès de sa photo.
Désormais il reste un pion dans le jeu de Nike. Le litige reprend 20 ans plus tard, justement, en 2015 il revient devant la
court federal d’Oregon en s’appuyant encore une fois sur les droits d’auteur.
Cette fois-ci ce n’est pas Nike qui lui pose problème mais c’est le Juge
Mosman, il considère qu’il n’y a pas d’infraction puisque Nike reprend des éléments
dits “non-protégés” comme le panier de basket, le ballon et le saut en l’air.
Le cas a été finalement rejeté en juin, à ce que le juge ajoute que “la loi ne
protège pas les idées, mais l’expression de celles-ci”. Une nuance pas évidente
qui relève d’une réflexion trop intense pour être poursuivie un mercredi à 8h
du matin. Mais si on peut tirer quelque chose de tout ce que je viens de vous
raconter, c’est qu’il n’est jamais trop tard pour défendre nos droits et que si
vous voulez réussir dans la vie il faut avoir un lapin sous la manche... ou dans
le panier... c’est comme vous voulez.
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